Les passionnés de la chanson sentimentale en général et les fans de Yasmina en particulier se régaleront sans nul doute et à satiété du nouveau produit de cette vedette de la chanson kabyle : 11 belles chansons et presque toutes des romances !
Comme à son accoutumée, l’icône des femmes kabyles, opte pour des mélodies au rythme lent qui nous font voyager dans l’univers de l’amour où s’entrecroisent joie et peine, espérance et désespérance. Le tout est agrémenté de quelques ichewiqen que seul Yasmina en connaît les secrets. Des poèmes au parfum automnal qui nous (re) donne envie d’aimer et de se donner à l’être qu’on aime sans retenue, tout en sachant qu’ « il n’y a pas d’amour heureux ». L’être aimé s’en va sans nous donner de raisons recevables. Il s’en va et, au bout d’un certain moment, il revient et nous lui pardons sans savoir pourquoi, tout en croyant dur comme fer qu’on est capable de le changer … parce qu’on l’aime. Quand on aime, on accepte de souffrir et parfois sans même demander réparation du mal subi. C’est ce penchant qu’a l’amoureux à excuser qui lui fait subir de sempiternelles afflictions. C’est, en gros, ce qui se dégage du nouvel album de Yasmina édité récemment. L’immense talent de notre chanteuse autodidacte est à saluer à plus d’un titre.
En effet, en plus de sa voix tendre et chaleureuse, elle a su en tiré profit du riche patrimoine langagier kabyle (maximes populaires, proverbes, dictons, etc.). Et pour couronner le tout, Yasmina s’adonne à cœur joie au voluptueux jeu de la versification. Un jeu dont l’auditeur ne peut s’empêcher de savourer la beauté des rimes et des métaphores.
Plusieurs thèmes ont été abordés dans cet album, tels que la complainte de la femme battue (At Zik akka ay d-qqaren), les retrouvailles après une longue séparation avec son bien aimé (Timlilit), séquelles d’un amour ayant connu une triste fin (Lexyal), l’amitié (Win i k-yexdan), l’amour de la mère pour ses enfants (Amenzu n tassa), la jalousie en amour (Hemlegh-t Usmegh), l’attente et l’espoir d’une femme suite à l’hospitalisation de son bien-aimé gravement blessé dans un accident de la route (Laksida), le chantre de la chanson kabyle Lounes Matoub (Tajmilt i Lwennas, Ayen Ayen), etc.
Yasmina rend un vibrant hommage à Lounes Matoub dans deux chansons. Plus qu’une simple évocation, on entrevoit à travers ces deux chansons la rencontre naturelle de deux âmes. Celles de Matoub et Yasmina dont la ressemblance est criante. Outre la force du verbe, Lounes et Yasmina sont des artistes adoptés par la rue : ils sont des portes paroles de la Kabylie profonde.
Par ailleurs, sur le plan musical, on y constate plus de professionnalisme chez Yasmina (choix des mélodies, instrumentation, etc.). A l’instar de la diva Nouara, Yasmina se singularise de plus en plus avec un style qui lui est propre. L’expérience de la chanson hommage à Ferhat Imazighen, incluse dans son avant-dernier album, que d’aucun ont salué, a été rééditée plusieurs fois dans ce dernier album. Ce qui nous amène à nous poser la question si Yasmina a l’intention de s’engager dans cette nouvelle voie. En tout cas, ce léger changement n’a pas altéré la touche de Yasmina, au contraire elle a enrichie à certains égards.
Enfin, ce qui est sûr, c’est que ce nouveau produit de Yasmina n’est pas saisonnier, on peut le réécouter sans se lasser.
Karim Kherbouche