Le directeur de Radio Soummam a essuyé le tir groupé des élus, en réunion de l’assemblée populaire de la wilaya de Béjaïa, qui ont dénoncé vigoureusement sa gestion depuis son installation à la tête de cette station locale à travers «une diffusion excessive des programmes dans une langue qui n’est pas comprise par l’écrasante majorité de la population locale à laquelle elle est censée s’adresser», lui a-t-on reproché.
Prenant le parole, Hamid Ferhat, président de l’institution élue de la wilaya de Béjaïa, n’y est pas allé de mainmorte pour fustiger la manière avec laquelle est administrée la radio locale de Béjaïa. Le P/APW, qui s’est engagé lors de son intervention à «tout faire pour la réalisation du nouveau siège de la station radio», a indiqué que «les responsables ont été saisis par des journalistes sur le malaise qui s’exprime au sein de cette radio. On a constaté un changement dans la grille des programmes qui n’arrange pas la localité. Nous voulons qu’elle fonctionne dans une logique qui répond aux aspirations de la population », a-t-il estimé avant de dénoncer «l’interdiction déguisée du passage des élus de l’APW sur les ondes de cette radio car il (le directeur) n’aime pas le débat contradictoire». Lui succédant dans la séance-débat, Nacer Toutou du FFS tire à son tour à boulets rouges sur l’actuel direction de la radio locale. «Si on aborde en session de l’APW le problème de cette radio c’est parce que cela risque de se faire à l’extérieur dans la rue et avec violence comme ce fut le cas durant les douloureux événements de 2001», alerte le vice-président de l’APW. Le même intervenant pense que cette radio qui est destinée, selon lui, à une population ayant «une particularité linguistique et identitaire se doit d’agir pour promouvoir la culture locale, produire et diffuser des programmes dans une langue parlée et comprise par la population». Se désolant de la suppression de la grille des programmes de certaines émissions «enrichissantes » en citant l’exemple de celle intitulée «Portrait de mon village », Nacer Toutou n’y va pas avec le dos de la cuillère pour s’élever contre ce qu’il a qualifié de «provocation». «Nous n’avons rien contre la langue arabe mais on constate que la station est devenue une boîte privée. Elle ne cesse de s’éloigner des aspirations de la population», concluant son intervention avant d’inviter le wali à prendre une résolution pour «remettre cette radio sur les rails conformément à l’article 58 du code de wilaya». Même son de cloche chez l’élu du RND ,Toufik Tahraoui, qui exige pour sa part que la radio «accompagne la dynamique de développement local». Enfonçant un peu plus le responsable de la station et prenant le soin de déresponsabiliser son parti, l’un des membres de l’alliance présidentielle au pouvoir, l’élu du RND, insiste pour souligner qu’«il n’y a aucune injonction venue d’en haut, le problème est local». Laïb Makhlouf, un élu du RCD, un ingénieur agronome de formation, qui intervient souvent dans des émissions consacrées à l’agriculture, citera l’instruction de la DG de la Radio nationale «stipulant clairement de consacrer 60% de la grille des programmes en langue arabe contre 40% en kabyle». Dans une déclaration intitulée «dérive et provocation», le RCD affirme que «l’actuel directeur, comme pour montrer patte blanche envers ses maîtres, est allé jusqu’à licencier abusivement l’animatrice de l’émission «Awal S Usefru», prétextant que cette dernière ne connaissait rien à la poésie arabe. Lors de la séance-débat, l’un des élus considère que la diffusion de programmes dans une langue autre que celle pratiquée dans cette région berbérophone constitue «une atteinte à la mémoire des martyrs de la Soummam ». Dans ses réponses aux interpellations des élus, tout en tenant à apporter la précision que le directeur de la radio ne fait pas partie de son exécutif pour expliquer son absence à la session de l’APW, Hamou Ahmed Touhami, le nouveau wali de Béjaïa, dans son intervention, a indiqué que «la diversité du paysage médiatique avec 17 radios locales de proximité n’ont pas de limites géographiques. Ces radios diffusent également des programmes en tamazight conformément au cahier des charges. Néanmoins, le directeur veut faire de cette radio une boîte privée mais il faut appuyer ces affirmations par des preuves. On va intervenir pour mettre un terme à cette situation», dira, en substance, le wali.
A. Kersani
Source: Le Soir d'Algérie